Soutenance de la thèse d'Antoine Mazot-Oudin
Soutenance de thèse
Titre de la thèse :
La politique au camping
Analyse comparée des rapports au politique des classes populaires en France et au Québec
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La soutenance aura lieu le mardi 25 août 2020, à partir de 17h.
En raison de la COVID, elle est organisée par vidéo-conférence. Il sera possible d’y assister via ce lien :
umontreal.zoom.us/j/98323451998
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Le jury sera composé de :
Laurence Bherer - CPDS - Université de Montréal : Présidente du jury
Pascale Dufour - CPDS - Université de Montréal : Directrice de recherche
Alexis Spire - École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS) : Codirecteur
Fabien Desage - CERAPS - Université de Lille : Codirecteur
Éric Agrikoliansky - IRISSO - Dauphine Université Paris PSL : Membre du jury
Nina Eliasoph - University of Southern California Dornsife : Examinatrice externe
Nicolas Sallée - Représentant du doyen de la FSJPS - Université de Lille
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Résumé
Victoire inattendue de Donald Trump aux États-Unis lors de la campagne présidentielle de 2016 ; succès du camp du Brexit au Royaume-Uni la même année ; disparition des deux partis de gouvernement au deuxième tour de la campagne présidentielle en France lors de l’élection de 2017 ; victoire majoritaire d’un tiers-parti, la Coalition Avenir Québec, lors de l’élection provinciale de 2018 au Québec : des deux bords de l’Atlantique, d’importantes recompositions des scènes partisanes et des résultats électoraux inopinés agitent les analyses politiques, médiatiques et pour partie universitaires. Ces phénomènes sont parfois interprétés au travers du prisme de la « montée des populismes ». Certains travaux pointent du doigt le « peuple » et sa propension à se laisser séduire, voire berner, par des leaders « populistes ». L’explication, souvent sur la base d’enquêtes de sondage, serait à trouver dans le vote, pêlemêle, des « perdants de la mondialisation », des classes populaires ou encore du monde ordinaire des zones rurales. Le constat d’un champ politique apparemment chamboulé par les franges dominées du monde social s’accompagne du paradoxe de pauvres votant contre leurs intérêts supposés.
En France, ces questionnements s’inscrivent en partie dans des débats autour du vote des classes populaires dans un contexte d’effacement du clivage gauche-droite comme référent politique. Au contraire, au Québec, la scène partisane est présentée comme de plus en plus polarisée autour de ce clivage en raison du moindre attrait de la cause souverainiste tandis que la notion de classes populaires n’est pas aussi centralement mobilisée par les analyses politiques. En comparant ces deux cas distincts, ce travail de recherche vise à éclairer sous un jour qualitatif les rapports à la politique et au politique des classes populaires en France et au Québec.
Sur la base d’une enquête ethnographique dans deux campings populaires dans le Pas-de-Calais et dans la partie sud de la région de Québec, ce travail étudie par le bas et dans une perspective comparée les représentations et les attitudes politiques de campeuses et de campeurs saisonniers dans des contextes de loisirs. Je mobilise comme données d’enquête une campagne d’une cinquantaine d’entretiens, des observations ethnographiques réalisées pendant deux saisons estivales dans ces deux campings et dans d’autres espaces de loisirs.
En analysant les représentations ordinaires des sphères partisanes et les sens sociaux du vote auprès des enquêté-e-s rencontré-e-s, ce travail souligne une même distance soupçonneuse vis-à-vis du champ politique auprès de groupes sociaux aux propriétés sociales comparables. Le vote y apparait comme une information politique équivoque et parfois difficilement interprétable. A rebours des seuls schèmes savants de compréhension du jeu politique, ce travail souligne la mobilisation parmi les classes populaires françaises et québécoises d’outils profanes comparables, les indices et les rumeurs, qui observés in situ illustrent la pluralité des modes d’appréhension de la politique.
Pour partie faiblement connectées aux enjeux du champ politique, souvent en écho à des expériences personnelles, les attitudes politiques des classes populaires nécessitent d’être étudiées dans une perspective plus large. Ces rapports au politique se comprennent davantage en réinscrivant ces représentations politiques et du monde social dans les relations qu’entretiennent ces enquêté-e-s à l’État et dans les frontières identitaires et de classe qu’ils et elles mobilisent pour se situer socialement. Cette recherche souligne ainsi les divergences et les effets de trajectoires sociales et de lieu dans les visions du monde que mobilisent les classes populaires dans ces deux espaces nationaux.
Ma contribution vise donc à éclairer sous un autre jour les recompositions des scènes partisanes en France et au Québec en abordant la question au travers des rapports ordinaires à la politique des classes populaires. Elle esquisse une sociologie politique des classes populaires au Québec et prend position dans les débats portant sur la droitisation des classes populaires et sur la « montée des populismes » en France et au Québec en proposant une contribution méthodologique à l’ethnographie du politique.
Mots-clés : Classes populaires, Vote, Camping, Ethnographie du politique, Comparaison, Clivage gauche-droite, France, Québec.
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