Séminaire Internationalistes et anarchistes : Deuxième séance : "Passeurs et médiateurs"

Séminaire international
R3.48

Séminaire Internationalistes et anarchistes organisé par Isabelle Felici (ReSO, Université Paul-Valéry Montpellier 3) et Sidonie Verhaeghe (CERAPS, Université de Lille)

Deuxième séance : "Passeurs et médiateurs"

avec Constance Bantman et Giorgio Sacchetti

25 janvier 2024, à partir de 14h, en salle R3.48

Constance Bantman Jean Grave, la culture de l’imprimé et les réseaux transnationaux de l’anarchisme, 1870-1939

À travers l’exemple de Jean Grave (1854-1939), journaliste, éditeur, théoricien, pédagogue et organisateur de campagnes, cette intervention proposera une analyse des circulations transnationales d’imprimés anarchistes sur plusieurs décennies, et des réseaux complexes et dynamiques qui les animent. Les périodiques de Jean Grave, d’une longévité frappante, ainsi que les livres et brochures qui y étaient associés, ont joué un rôle central dans le débat et la diffusion des idées anarchistes à l’échelle mondiale avant 1914, en faisant entrer en contact militants, groupes et organisations par-delà les frontières, alors même que celles-ci se durcissaient, du fait notamment de la répression intense qui entourait la circulation des publications anarchistes. La personnalité clivante de Jean Grave, son dévouement à l’organisation du mouvement anarchiste, sa capacité à créer et mobiliser des réseaux, ainsi que son engagement internationaliste sont au cœur de cette diffusion exceptionnelle, jusqu’à la déroute de ces stratégies au lendemain de la Première Guerre mondiale. Ces perspectives seront au centre de notre analyse, qui interrogera également la façon dont le genre biographique peut servir de point d’entrée à l’histoire des mouvements sociaux.

Constance Bantman est professeure associée à l’Université du Surrey en Grande-Bretagne. Ses recherches portent sur l’histoire du mouvement anarchiste entre 1870 et 1939, dans une perspective transnationale, en étudiant en particulier les réseaux et la culture de l’imprimé. Elle a notamment écrit The French Anarchists in London. Exile and Transnationalism in the First Globalisation, 1880-1914 (LUP, 2013; traduction française à paraitre chez Libertalia en 2024) et Jean Grave and the Networks of French Anarchism (Palgrave, 2021). Elle a également codirigé plusieurs ouvrages, dont Reassessing the Transnational Turn. Scales of Analysis in Anarchist and Syndicalist Studies (avec Bert Altena; Routledge, 2015; PM Press 2017).

Giorgio Sacchetti Umberto Marzocchi militant transnational (1900-1986) Itinéraires intellectuels et réseaux relationnels

Umberto Marzocchi est un anarchiste italien dont le parcours de vie se caractérise par un engagement constant, avec des facettes multiples, puisqu’il a passé une bonne partie de sa vie en exil : en 1922, il quitte la ville de Savone, près de Gênes, où il réside et où il a déjà eu de nombreuses activités politiques, et n’y revient qu’au bout de vingt-trois ans. Sa première étape est la France, où il déplace beaucoup, notamment à Lyon, Paris et Lille. C’est de Lille que, à l’été 1936, il s’occupe de transférer d’importants chargements d’armes depuis la Belgique vers l’Espagne. En Espagne, il combat au sein de la colonne italienne de Francisco Ascaso, puis à nouveau en France, dans la Résistance, autant d’expériences qu’il met ensuite à profit, sur la scène européenne et globale. Membre influent de la FAI, Federazione Anarchica Italiana, et dirigeant national d’associations de résistants, syndicaliste actif au sein de la CGIL, Confederazione Generale Italiana del Lavoro, il est aussi l’un des fondateurs et, pendant de nombreuses années, le secrétaire de l’Internationale des Fédérations anarchistes, créée en 1968. Avec l’écrivain Carlo Cassola, il crée la Ligue pour le désarmement unilatéral à la fin des années 1970. Après son retour en Italie, il resté très attaché à l’Espagne et à la France, qu’il considérait comme sa seconde patrie et où il revenait régulièrement.

Cette intervention propose de se pencher sur cette longue activité de militant libertaire, à travers les itinéraires intellectuels et les réseaux relationnels complexes qui se mettent en place, sur le long terme, au niveau transnational, intergénérationnel, amical et militant, dans un dialogue continuel avec les autres cultures politiques de gauche : des subversifs italienne à l’époque du biennio rosso italien aux antifascistes en exil, de l’Espagne révolutionnaire au maquis français, des personnes engagées contre les régimes totalitaires et franquiste en Europe au moment de la Guerre froide, jusqu’aux jeunes des mouvements contre-culturels de 1968 et 1977.

Giorgio Sacchetti est historien, spécialiste de l’histoire de l’anarchisme italien et du mouvement ouvrier. Il enseigne à l’université de Florence. Parmi ses publications les plus récentes, citons : Sans frontière. Umberto Marzocchi (1900-1986), penseur et acteur de l’anarchisme internationale, Les Éditions Libertaires, Paris, 2020; Veglia anarchica mensile (1926-1927) diretta da Virgilia D’Andrea, Nova Delphi Academia, Roma, 2020 ; Umanità Nova 1920-2020, Zero in Condotta, Milan, 2022; "Piombo con piombo". Il 1921 e la guerra civile italiana, Carocci, Roma, 2023.


Partager sur X Partager sur Facebook