Sarah Mazouz - Race
Parutions
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L'autrice : Sarah Mazouz, chargée de recherche au CNRS - Sociologie
Sarah Mazouz est sociologue, chargée de recherches au CNRS. Ses travaux s’appuient sur des enquêtes ethnographiques et mobilisent les critical sace studies, la sociologie du droit, la sociologie des poli-tiques publiques et l’anthropologie critique de la morale. Dans son ouvrage La République et ses autres. Politiques de l’altérité dans la France des années 2000 (ENS Éditions, 2017), elle montre comment s’arti-culent dans l’espace social immigration, nation et racialisation. En étudiant les résistances opposées à la mise en œuvre d’une politique publique de lutte contre les discriminations raciales et les pratiques de naturalisation, elle interroge l’économie des relations entre identité, égalité et citoyenneté dans le contexte républicain. Sarah Mazouz a contribué au dossier « Intersectionnalité » de la revue Mouve-ments (février 2019).
Lien site internet : Librairie Eyrolles
Editeurs: Anamosa
Collection : Le mot est faible
Les répercussions mondiales de la mort de George Floyd le 25 mai 2020 l'ont montré : plus que jamais il est utile de défendre un usage critique du mot race, celui qui permet de désigner et par là de déjouer les actualisations contemporaines de l'assignation raciale.
User de manière critique de la notion de race, c'est décider de regarder au-delà de l'expression manifeste et facilement décelable du racisme assumé. C'est saisir la forme sédimentée, ordinaire et banalisée de l'assignation raciale et la désigner comme telle, quand elle s'exprime dans une blague ou un compliment, dans une manière de se croire attentif ou au contraire de laisser glisser le lapsus, dans le regard que l'on porte ou la compétence particulière que l'on attribue. C'est ainsi expliciter et problématiser la manière dont selon les époques et les contextes, une société construit du racial.
Si le mot a changé d'usage et de camp, il demeure cependant tributaire de son histoire et y recourir de manière critique fait facilement l'objet d'un retournement de discrédit. Celles et ceux qui dénoncent les logiques de racialisation sont traité·es de racistes. Celles et ceux qui mettent en lumière l'expérience minoritaire en la rapportant à celle des discriminations raciales sont accusé·es d'avoir des vues hégémoniques. Dans le même temps, les discours racialisants continuent de prospérer sous le regard indifférent de la majorité.
Si le mot de race sert à révéler, y recourir est donc d'autant plus nécessaire dans le contexte français d'une République qui pense avoir réalisé son exigence d'indifférence à la race et y être parfaitement " aveugle ", " colour-blind ", dirait-on en anglais.